Inutile, dangereuse et irresponsable : l’initiative « pour l’autodétermination », c’est clairement NON le 25 novembre prochain !

L’initiative « Le droit suisse au lieu de juges étrangers », dite « pour l’autodétermination », propose de placer la Constitution fédérale au-dessus du droit international dans la hiérarchie des normes de notre pays. Cette initiative est aussi inutile, que dangereuse et irresponsable.

Conformément à la Constitution fédérale, le Conseil fédéral signe et ratifie les traités internationaux, lesquels sont soumis pour approbation à l’Assemblée fédérale. Les plus importantes de ces conventions sont d’ailleurs soumises au référendum.

C’est donc souverainement et démocratiquement que la Suisse décide des accords qu’elle entend conclure avec les autres pays. La conclusion d’un traité ne peut jamais lui être imposée par l’étranger. Si notre pays considère qu’une convention ne lui est plus favorable, il peut le dénoncer ou le renégocier.

En d’autres termes, l’initiative « pour l’autodétermination » brille tout d’abord par son inutilité.

La conclusion d’un accord international repose sur une analyse préalable des opportunités et des risques, d’une part, sur des négociations avec les autres pays contractants, d’autre part.

Or, ne l’oublions pas, l’une des principales forces de la Suisse n’est autre que sa stabilité institutionnelle et la confiance qu’elle inspire aux autres Etats. Adopter un mécanisme qui aurait pour effet de ne plus garantir que la parole donnée sur la scène internationale soit honorée sur le plan national aurait pour effet d’anéantir notre crédibilité et notre capacité à tenir nos engagements. La solidité juridique de la Suisse en serait affaiblie, ce qui découragerait les investisseurs et porterait gravement atteinte à nos intérêts politiques et économiques.

Pire, la liberté de manœuvre de nos négociateurs s’en retrouverait affaiblie, puisque leurs interlocuteurs demanderaient forcément à la Suisse de fournir des garanties ou des gages supplémentaires afin de s’assurer que les accords conclus avec notre pays seront effectivement respectés.

En d’autres termes, l’initiative « pour l’autodétermination » constitue un danger considérable pour le fonctionnement de nos institutions et pour la vitalité de notre économie.

Enfin, nous sommes une nouvelle fois en présence d’une belle démonstration de cette attitude lamentable qui consiste à fustiger tout ce que les Etats européens entreprennent depuis le lendemain de la Seconde Guerre Mondiale pour faire de l’Europe un havre de paix et de stabilité.

De nouveau, on mélange l’Union européenne (UE), dont la Suisse ne fait pas partie, et le Conseil de l’Europe, organisation internationale dont la pièce maîtresse est la Convention européenne des droits de l’Homme (CEDH) et dont notre pays est membre depuis 1963.

L’initiative « pour l’autodétermination », qui évoque des « juges étrangers » dans son titre tendancieux sans même en faire état dans le texte constitutionnel proposé, a notamment en ligne de mire la Cour européenne des droits de l’Homme, composée d’un juge par État membre.
Or, il ne s’agit pas de « juges étrangers », mais bien de juges internationaux élus par une assemblée composée de parlementaires nationaux issus des pays membres du Conseil de l’Europe. De surcroît, la Suisse est le seul Etat partie à la CEDH qui compte deux juges à Strasbourg ! En effet, le Lichtenstein est également représenté par un juge suisse.

La Suisse n’est désavouée par la Cour européenne des droits de l’Homme que dans environ 1,6 % des affaires la concernant. Notre pays peut dès lors être considéré comme un modèle en matière de protection des droits fondamentaux, quand bien même on peut toujours faire mieux. N’oublions pas non plus qu’historiquement, les libertés fondamentales ont pour objectif de nous protéger des régimes totalitaires et des excès de l’Etat.

En d’autres termes, l’initiative « pour l’autodétermination » affaiblit les citoyens de notre pays en les privant d’une protection juridique qui a clairement fait ses preuves. En cela, cette initiative est parfaitement irresponsable.

Le 25 novembre 2018, nous vous invitons à voter et à faire voter NON à cette plaisanterie juridique qui a assez duré !

Article écrit avec Joëlle FISS, analyste en droits de l’Homme, paru dans l’édition d’octobre 2018 du Nouveau Genevois

Retour en haut