Une nouvelle constitution par amour de Genève

Article paru dans Le Nouveau Genevois de septembre 2011

« Pour moi c’est clair, je voterai non à la nouvelle constitution. » Voilà ce que l’on entend trop souvent depuis une année dans le cadre du processus de révision totale de la constitution genevoise. Pourtant, ceux qui s’expriment de la sorte n’ont généralement pas lu le moindre article de l’avant-projet du 13 janvier 2011. Ce sont davantage les jérémiades médiatisées de certains groupes que le véritable contenu de ce premier brouillon, qui ont eu pour effet de créer un tel climat d’hostilité envers la Constituante.

À moins d’une année de la fin de ses travaux, la Constituante entre désormais dans une phase décisive. Dès septembre prochain, elle siégera exclusivement en séances plénières. Ce texte fera l’objet de trois lectures entre l’automne et le printemps prochains, avant d’être soumis au vote du peuple le 14 octobre 2012.

Les principaux désaccords sont connus. Pour résumer, il s’agit pour la gauche de la suppression du droit au logement et de l’interdiction du nucléaire, et de l’introduction de l’incompatibilité élective des fonctionnaires, du frein à la pénurie de logement et du frein à l’endettement. Pour les groupes de l’Entente, il s’agit de la réduction du nombre de signatures pour les initiatives populaires et les demandes de référendum, de la diminution des pouvoirs du Conseil d’Etat, de l’introduction d’un droit de résistance à l’oppression et d’un salaire parental, de la suppression de la complémentarité des modes de transport et d’un catalogue trop long des tâches de l’Etat. Pour l’UDC et le MCG, il s’agit essentiellement de l’éligibilité communale des étrangers.

Aujourd’hui, aucun parti n’est en mesure de soutenir l’avant-projet. Il est donc nécessaire de trouver un compromis solide entre les partis gouvernementaux, en tentant de rallier autant que possible les autres groupes si l’on veut réussir l’exercice.

Comment ? En rappelant à la Constituante sa véritable mission : rédiger une nouvelle constitution cantonale. C’est bien en prenant conscience qu’elle ne peut pas faire tout et n’importe quoi qu’elle atteindra son objectif. Une limite majeure se trouve dans les décisions populaires de ces 25 dernières années, soit la durée d’une génération.

En d’autres termes, dans une dynamique de compromis, la Constituante est politiquement condamnée à conserver l’esprit des articles les plus sensibles de la constitution actuelle, tout en les épurant des détails qui n’ont pas à figurer dans la constitution, mais dans la loi. Dans le domaine de l’énergie par exemple, cela signifie que l’opposition au nucléaire peut être maintenue dans le texte constitutionnel, mais que l’interdiction du chauffage électrique n’a rien à y faire.

Par ailleurs, lorsqu’une question particulièrement sensible n’a pas besoin d’être tranchée par la constitution, la Constituante peut prévoir des délégations au législateur ou un vote avec variante, ce qui a été confirmé par un avis de droit du Professeur Andreas Auer en novembre 2010. En procédant ainsi, elle évitera de surcharger le texte constitutionnel avec des innovations pouvant à elles seules faire échouer l’intégralité du processus de révision totale. Ainsi, même si le courage et le respect de la technique constitutionnelle commandent de procéder autrement, la question des droits politiques des étrangers pourrait être traitée de manière à laisser au peuple le choix entre le statu quo (droit de vote communal) et une variante (droit de vote et éligibilité communaux).

Genève n’a pas le droit d’échouer là où tous les autres cantons ont réussi au cours des quarante dernières années. C’est pourquoi, en sa qualité de parti fondateur des institutions genevoises et suisses, le PLR doit jouer un rôle déterminant durant cette dernière phase de travaux, en ouvrant des discussions avec les partis de sa gauche comme de sa droite et viser une claire majorité populaire en 2012.

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